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Le Frioul

Pomègues et Ratonneau, des îles fragiles

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© Parc national des Calanques
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Les îles du Frioul vues de Marseille © Ville de Marseille
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Marseille vue des îles du Frioul © Parc national des Calanques
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Les îles du Frioul vues de Marseille peintes par Jean-Baptiste Olive
Silhouette de calcaire au large de Marseille, l’archipel du Frioul pointe vers la côte les reliefs aigus de ses quatre îles : Pomègues et Ratonneau, If et Tiboulen. Leur formation géologique ancienne est étroitement liée à celle du continent puisqu’il y a 2 millions d’années un isthme les reliait à la terre !

 

Des paysages sculptés par le vent

Son caractère affirmé ainsi que ses reliefs tourmentés font de l’archipel du Frioul un site exerçant un pouvoir de séduction irrésistible : calanques, à-pics impressionnants, lumière implacable, transparence de l’eau…

Le mistral est ici l’artisan du microclimat le plus aride de France avec le littoral sud de Marseille : il sculpte, il ronge, il ordonne. Ce faisant, il crée des paysages végétaux clairsemés qui se détachent en « peau de léopard » sur des rochers à la blancheur immaculée.

 

L’archipel aux fleurs et aux oiseaux

Au fil du temps, des formes de vie animale et végétale se sont adaptées à cet environnement extrême, dont la biodiversité riche et précieuse doit être préserver. Les îles du Frioul sont notamment le royaume des plantes (près de 350 espèces dont 20 protégées), dont certaines sont « xérophytes » (adaptées à la sécheresse) ou « halophytes » (adaptées au sel), comme l’astragale de Marseille et le lys des sables. Elles sont fragiles, et ne doivent pas être cueillies ni piétinées. Certaines espèces, comme la fumeterre de Munby, ne peuvent être observées en aucun autre endroit du Parc national.

Les lieux sont également un refuge pour de nombreux oiseaux marins, notamment le puffin cendré, le puffin yelkouan, l’océanite tempête, le cormoran huppé et le faucon pèlerin. Le goéland leucophée règne en maître, notamment à la batterie Cavau, son fief. On retrouve tous ces oiseaux sur l’archipel de Riou.

D’autres espèces encore, rares et protégées, vivent au Frioul : le phyllodactyle d’Europe, le monticole Bleu, la chevêche d’Athéna…

 

Un monde sous-marin foisonnant

Sous l’eau, le relief, l’orientation et la forme des îles ont favorisé une vie aquatique riche et variée. Le mérou brun, l’hippocampe moucheté, le corail rouge et la grande nacre évoluent dans une véritable mosaïque de paysages.

À Saint-Estève, un sentier sous-marin entretenu par la Ville de Marseille permet aux baigneurs de découvrir la faune et la flore marine avec masque et tuba. Composé de cinq bouées numérotées auxquelles sont accrochés des panneaux d’information, ce sentier est en accès libre.

 

 

Un site emblématique

Sa toponymie est liée à l’expression Fretum Julii : en latin, « détroit de Jules », parce que Jules César y avait établi son mouillage lors du siège de Marseille, en 49 avant notre ère. Pomègues, l’île la plus au sud (à gauche depuis Marseille), provient de Portus Mes Aigues : « port au milieu des eaux », et Ratonneau, la plus au nord (à droite), de Portus Ratonelli : « port des petits rats (ratons) ». Une autre explication se réfère au celtique rate, qui signifie « rempart » ou « fort », et qui convient bien à la position naturellement fortifiée de l’île.

Les îles du Frioul marquent la vision de la baie depuis la ville, en découpant de leur silhouette caractéristique le paysage maritime marseillais. À ce titre, de nombreux artistes, d'Alexandre Dumas à Robert Guédiguian, les ont abordées dans leurs œuvres.

 

Une zone historique de quarantaine

Les îles du Frioul formaient un des plus grands complexes sanitaires de la Méditerrané, autour du port du Frioul et de l’hôpital Caroline. Digue, hangars, citernes, pavillons, bittes d’amarrage directement taillées dans la roche, et même une chapelle, aux allures de temple grec, témoignent aujourd’hui de cette histoire.

Par leur position stratégique d’avant-port et leur isolement insulaire, les îles ont très tôt été utilisées pour protéger la cité phocéenne et procéder à la mise en quarantaine des navires susceptibles d’être porteurs de maladies contagieuses (peste, choléra, typhus…). En 1627, l’anse naturelle de Pomègues est choisie à cet effet et tous les navires en provenance de l’Orient doivent dès lors y mouiller avant de pouvoir se diriger vers le port de Marseille.

 

Le port du Frioul

Face à la propagation de la fièvre jaune en Méditerranée, les autorités décident en 1822 de doter l’archipel d’un vrai port de quarantaine. La construction de la digue de Berry, qui relie Pomègues à Ratonneau, est la réalisation centrale de ces travaux d’aménagement. Ce fut un chantier hors du commun : longue de 315 mètres et largue de 32 mètres, elle demandera l’extraction de 650 000 tonnes de pierre prélevée sur les deux îles, ainsi que le travail de 600 ouvriers et 200 chevaux.

Aujourd’hui, le port de plaisance accueille plus de 600 bateaux. Non loin de là s’élève la Maison des Pilotes qui dresse sa proue en forme de bateau : de là on assiste les entrées et sorties des navires des ports de Marseille et Fos.

 

 

La calanque de Saint-Estève

Pour accompagner la construction des nouveaux équipements portuaires et sanitaires du Frioul, des carrières sont exploitées sur l’archipel dès 1822. Pour loger les centaines d’ouvriers mobilisés, des baraquements sommaires sont construits au bord de la plage de Saint-Estève. Les conditions de travail dans les carrières sont très dures : seize heures de travail quotidien en été et douze en hiver.

La Marine nationale interrompt définitivement l’exploitation des carrières en 1878, suite à l’explosion d’une charge ayant provoqué l’écroulement de la pointe sud du fort de Ratonneau.

Aujourd’hui, Saint-Estève a bien changé ! Une buvette et un poste de secours ont remplacé les baraquements. La plage, prisée, est surfréquentée en été. Elle est naturelle, c’est-à-dire que l’homme n’est pas intervenu pour la réensabler, contrairement à la majorité des plages du littoral méditerranéen.

 

Le patrimoine militaire

Les îles du Frioul ont eu un rôle primordial dans l’organisation défensive de Marseille, ou dans l’attaque contre celle-ci, dès le XVIe siècle, avec la construction de bâtiments comme le fort de Ratonneau. Hitler qui en comprit l’intérêt stratégique qualifia l’archipel de « véritable éperon rocheux pouvant foudroyer une éventuelle armée alliée » avant d’installer ses troupes à Ratonneau.

Haut-lieu de l’histoire militaire de Marseille, le Frioul porte de nombreux stigmates de la Seconde Guerre mondiale. Plusieurs creux dans le paysage ont été formés par les impacts d’obus largués par les forces américaines lors du bombardement allié du 24 au 27 août 1944.

 

 

Le Frioul aux temps modernes

Dès la fin des années 1880, la Compagnie de navigation côtière organise des excursions le dimanche qui permettent aux Marseillais de visiter les îles. Le succès sera si grand qu’elle devra plus tard affréter cinq vapeurs ! Transformée en 1921 en Société côtière et du château d’If, elle est l’ancêtre de notre navette maritime d’aujourd’hui.

En 1971, une grande partie de l’archipel est cédée par l’armée à la Ville de Marseille. Le développement urbain et économique est alors enclenché. En 1974 est construit un village moderniste, mélange de kasbah et de médina. Il est dessiné par de jeunes architectes marseillais, réunis autour de Josep Lluís Sert, connu pour avoir conçu un musée réputé : la Fondation Maeght. Situé aux portes d’une nature protégé, le hameau abrite une centaine d’habitants, et voit passer chaque année plus de 400 000 visiteurs.

En 2014, la Ville de Marseille cède les 136 hectares d’espaces naturels terrestres au Conservatoire du Littoral qui y exerce une protection foncière. Désormais le site est donc co-géré par la Ville de Marseille, le Conservatoire du Littoral et le Parc national des Calanques. La ferme aquacole située sur l’île de Pomègues, élevant des loups des Calanques et des daurades royales, a été reconnue première ferme biologique en Europe.

 

« La mer, à l’entrée de Marseille, porte ces canots de roche, ces corbeilles de pierre, le château d’If, Pomègues, Ratonneau, qui ont la divine sécheresse des marbres. Mais entre la vague changeante et le mobile azur du ciel, les marbres palpitent ; sous la caresse de la lumière, la pierre se fait chair ; et quand le soleil la mord, avec la large bouche et le rire éclatant du mistral, la pierre palpitante bondit. »

André Suarès, Marsiho

Le saviez-vous ?

L’homme a occupé les îles du Frioul dès le Néolithique. En 2001, les artistes performeurs Abraham Poincheval et Laurent Tixador y ont vécu dans les conditions de la Préhistoire. Ainsi la boucle est-elle bouclée !

Visite et réglementation

Avant toute sortie au Parc national des Calanques, préparez votre visite et consultez les bons gestes à adopter et les réglementations à respecter en cœur de Parc national (zone verte sur cette carte).

En outre, l'arrêté municipal du 5 février 2021 réglemente la circulation et les usages sur les espaces naturels terrestres de l’archipel du Frioul. En plus de la réglementation appliquée dans le cœur du Parc national sont spécifiquement interdits la pratique du vélo (exceptées dans la zone du village et sur la route menant à l’hôpital Caroline) et la pratique de l’escalade.

La nature du Frioul est particulièrement fragile. Pour participer à la préservation de la végétation et assurer la tranquillité des oiseaux nicheurs, veuillez respecter les espaces naturels (pas d’abandon de déchets ni de nuisances sonores), rester discret et ne pas quitter les sentiers balisés. Il est interdit de cueillir des fleurs, notamment le lys des sables, espèce rare et protégée.

La plage de Saint-Estève est surfréquentée en été : reportez-vous à notre page Plages et baignade pour davantage de renseignements.

 

Accès

Bateau Frioul-If à partir du Vieux-Port.

 

 

Localisation

Coordonnées GPS : 43.278625, 5.307833

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